
Avez-vous remarqué que la liberté est devenue un mot suspect en notre république ? Soit il n’est plus défini, car il n’évoque plus rien à l’instar des éculées « valeurs de la République », soit il n’est plus prononcé du tout, car trop ambivalent. Ou alors, la liberté est employée dans des circonstances bien précises, encadrée comme il se doit de gardes-du-corps lexicaux, comme dans la formule « liberté d’expression » dont on sent bien que le complément retranche plus qu’il n’ajoute.
A l’heure de l’état d’urgence permanent, la liberté s’est mutée en alibi criminel selon la propagande officielle. Voulez-vous sortir vaquer à vos occupations naturelles d’homme naïf et inconscient ? Vous mettez en danger la société dans son ensemble. Vous êtes un égoïste propagateur de mort, un irresponsable, un séditieux, une honte pour le genre humain.
Dans ces conditions, que représente dans le champ médiatique les quelques clameurs isolées réclamant la liberté de culte, la liberté de penser, la liberté de travailler, la liberté de contester, la liberté de se réunir, la liberté d’entreprendre et de commercer ?
Pour le Système, la première nécessité est de marginaliser les récalcitrants. L’entreprise est menée dare-dare sur le terrain de la représentation médiatique à force de culpabilisation, de déconsidération, de censure et de diffusion de la peur. Dans le monde réel, la surveillance, les contrôles, les menaces, les amendes et les condamnations judiciaires matérialisent le verrouillage autoritaire.
Tout incite, force et contraint à rentrer dans le rang, et si je n’ai jamais été un consommateur du poison libéral tant en philosophie qu’en économie, je n’ai jamais supporté le totalitarisme, et toute sa suite technocrate, sa tyrannie à visage d’expert.
Il est donc temps de se demander : la liberté, pour quoi faire ?
Cette boutade de Lénine, Bernanos la posait de manière testamentaire au sortir de la dernière guerre mondiale décelant dans le nouveau monde en gestation des caractéristiques profondes qui n’ont cessé de confirmer ses avertissements : montée de la civilisation des machines, abaissement spirituel de la conscience, disparition de l’homme libre. Son ultime espérance, l’exilé revenu en son pays la place dans la France et dans sa mission chrétienne, disons-le, d’être le levain du monde.
Sans tomber dans l’exégèse, notons seulement la clairvoyance de l’écrivain sur les dangers qui menacent la liberté politique, c’est-à-dire la mise en place d’un totalitarisme mondial dans lequel l’individu et les sociétés anciennes seront broyées au profit d’un collectivisme qui ne dit pas son nom. « Le communisme disparaîtrait demain, comme a disparu l’hitlérisme, » prévient-il, « que le monde moderne n’en poursuivrait pas moins son évolution vers ce régime de dirigisme universel auquel semble aspirer les démocraties elles-mêmes. »
Nous le savons désormais. La chute du bloc soviétique a tourné la page du XXème siècle, mais n’a pas mis fin aux ambitions mondialistes totalitaires, ni même au communisme à proprement parler. La fin de l’histoire popularisée dans les années 1990 est bien plus une formule programmatique qu’un constat historiographique.
Assis sur les marches du siècle présent, nous voyons bien que les crises successives qui secouent le monde sont autant de chocs qui permettent au Système de resserrer son emprise. Attentats terroristes, krachs boursiers, pandémie virale, chaque déstabilisation est un effet d’aubaine économique, politique et autoritaire.
Vous m’objecterez que cela est faux puisque ces accidents démontrent publiquement la faiblesse du Système, ses incohérences profondes et sa fin prochaine. Ce n’est malheureusement qu’une apparence provoquée par la nature dialectique de la politique mondialiste que nous avons à combattre.
Si nous prenons l’exemple de la pandémie du Covid-19, la ruine de l’économie réelle provoque une catastrophe sociale imminente en Occident, mais dans le même temps, on assiste à des gains records de la finance internationale nourrie par les dettes publiques, et à la consécration de l’économie numérique. Le bénéfice est donc double pour l’oligarchie mondialiste ayant anticipé le choc.
Cela entérine d’une part le nouveau mode de production et de consommation imposé par la révolution industrielle née avec l’irruption d’Internet. Cette première phase comprend en balancier la liquidation totale des anciens modes de production et de vente.
Si on prend une formule concrète et partielle : c’est Amazon contre les petits commerçants. Pendant que d’aucuns glosent contre la grande distribution comme dans les années 70, c’est désormais la vente en ligne et ses livraisons à domicile qui tuent le commerce traditionnel, en centre-ville comme dans les zones périphériques. Les mastodontes du secteur résisteront un peu, à coup d’inflation des prix et de coupes drastiques dans le personnel, tandis que les indépendants ne seront pas sauvés par l’Etat. Pourquoi le ferait-il ? Son administration le souhaite pour des commodités évidentes.
Réfléchissons à la lumière du passé. La Vème République s’est-elle portée au secours de la paysannerie française ces 50 dernières années ? Non, en revanche son administration a planifié scientifiquement la disparition de la petite paysannerie de subsistance au profit de l’avènement de l’exploitation agricole de masse. Le coût de l’opération ? Le remembrement, puis les suicides pour surendettement. Et la mise à jour n’est pas finie. Michel Houellebecq l’a décrit dans son dernier roman Sérotonine : « ce qui se passe en ce moment avec l’agriculture en France, c’est un énorme plan social, le plus gros plan social à l’œuvre à l’heure actuelle, mais c’est un plan social secret, invisible, où les gens disparaissent individuellement, dans leur coin, sans jamais donner matière à un sujet sur BFM ». Désormais, c’est au tour des indépendants et des commerçants que le gouvernement, dans sa morgue, a qualifié de « non-essentiels ».
Sectorisée, réduite aux égoïsmes corporatistes, la contestation est étouffée sous l’éteignoir de la peur moulé dans le fer des interdictions ministérielles.
Ici et là, juristes, élus locaux et chefs d’entreprise tentent de se battre, mais l’aboulie générale isole les recours et la révolte. C’est pourquoi je soutiens l’excellente initiative du Cercle Droit et Liberté emmené par Me Thibault Mercier, et que j’ai invité les commerçants d’Orange à attaquer le décret du confinement près le Conseil d’Etat. Il faut se battre avec les armes dont nous disposons, et ne pas les rendre avant même que d’avoir combattu.
C’est exactement le même cas de figure en ce qui concerne l’interdiction des messes et des cérémonies hors les obsèques. L’atteinte aux libertés religieuses est un excellent critère de basculement d’un régime dans le totalitarisme autoritaire. Emportée par l’hybris de la toute-puissance, l’idéologie officielle ne se contente plus de régner. Elle veut dominer exclusivement, sur les corps et les esprits. A la fin, le régime charge son bras séculier d’éliminer absolument les dernières traces de ses rivaux, lesquels souvent n’ont que le tort d’exister sans même se donner la peine de s’opposer.
Si personne ne se bat pour ce qui est précieux, logiquement l’opinion publique et le pouvoir en déduiront que la foi peut facilement être amendée, virtualisée et bientôt chassée de l’espace public et des cœurs.
Retenons deux éléments dans ces interdits qui ne sont pas innocents. Le catholicisme est touché dans l’essence même de ses rites, puisque la pratique des sacrements et des sacramentels courants est empêchée. Ensuite, la seule pratique montrée du doigt demeure encore une fois le christianisme alors même que seul lui dispose de la légitimité historique et de la communauté pratiquante la plus respectueuse des règles.
Au regard de ces quelques éléments, l’incompétence gestionnaire du gouvernement apparaît moins certaine. Surtout, peut-on encore parler d’incompétence ? Autant l’arrivée soudaine de l’épidémie a sidéré tout le monde, gouvernants comme population. 6 mois après le premier confinement, la décision d’un reconfinement à la carte, absurde et injuste dans sa casuistique, ne manque pas de susciter exaspération, colère et mépris. A juste titre.
N’oublions pas que nous avons affaire à des traîtres. L’incompétence ne peut couvrir l’entêtement contraire au bon sens. La corruption et l’adhésion à l’idéologie mondialiste, l’une alimentant l’autre, oui. C’est la seule rationalité émergeant de cet imbroglio kafkaïen dans lequel la folie provoquée sert juste à désorganiser le peuple.
Pour autant, il faut faire vite. Nous sentons bien qu’il y a un rétrécissement du temps et une accélération des événements. Parallèlement, la matière même de l’histoire, l’homme, est en passe de disparaître. Je parle bien entendu de l’homme libre, capable encore de se lever et d’accomplir sa mission spirituelle.
Là aussi, Bernanos avait prévenu : « Il faut se hâter de sauver l’homme, parce que demain il ne sera plus susceptible de l’être, pour la raison qu’il ne voudra plus être sauvé. Car si cette civilisation est folle, elle fait aussi des fous. »
Tout est encore possible. Ne soyons pas des complotistes. Soyons des conspirateurs. Le complotisme conduit à l’impuissance politique et à la représentation omnipotente du pouvoir. La conspiration, c’est l’essence même de l’action politique, c’est-à-dire la prise du pouvoir.
C’est dans cette unique perspective que nous travaillons hardiment à pousser Éric Zemmour face à son destin, car il est le seul candidat à haut potentiel capable de pirater la présidentielle déjà verrouillée de 2022.