Octobre 2018. Un rapport tombe sur le bureau du directeur général de la Santé, Jérôme Salomon. Les stocks d’État de masques chirurgicaux sont incomplets et doivent être renouvelés. 700 millions à l’époque, bientôt désuets, contre une recommandation formelle d’experts évaluée à 1 milliards de masques en cas de pandémie. L’échange de mails entre Jérôme Salomon et le directeur de Santé Publique au moment des faits ne laisse aucune ambiguïté : L’État commandera dix fois moins de masques que ce que le rapport préconise et somme les experts de modifier ce dernier pour avaliser cette décision.
Un an et demi après, la crise du COVID-19 éclate …
Rendue publique par la commission d’enquête du Sénat sur la gestion de la crise sanitaire, l’affaire alerte le rapporteur Bernard Jomier : « En octobre 2018, ont été recommandés seulement 100 millions de masques, ce qui fait que quand la crise est arrivée, nous n’avions pas assez de masques pour protéger les soignants dans de bonnes conditions, et ils en ont payé un lourd tribut. » Pour autant, les sénateurs demandent-ils la démission du directeur général de la Santé ? « Ce n’est pas notre rôle, nous sommes des politiques, pas des juges. » estime Alain Milon, président de la commission d’enquête. De fait, le Sénat ne prendra même pas la peine de transmettre l’affaire à la justice.
Pourtant, lors de son audition en septembre 2020 devant le Sénat, le directeur général de la santé s’est appuyé sur le rapport contrefait à sa demande deux ans auparavant « pour justifier l’inutilité de constituer un tel stock et la pertinence de n’avoir commandé que si peu de masques en octobre 2018 ». Réponse d’Alain Milon : « Il s’agit d’une omission, pas d’un faux témoignage ». Quelle mansuétude !
Pour l’heure, Jérôme Salomon reste donc à son poste et continue de sermonner les Français qui ne respectent pas les règles sanitaires. Faites ce que je dis, pas ce que je fais. Amen.