Syrie : une partie des politiques français aux limites de la compromission silencieuse !

Jacques Bompard intervenait en Séance sur le texte induisant la reconnaissance du génocide perpétré par l’Etat Islamique. « Le contentement orné de défense des droits de l’homme avec lequel une partie des politiques français ont traité les questions de la représentation politique en Syrie est une tâche indélébile. Une tâche parfois aux limites de la compromission silencieuse avec des massacres historiquement sanglants », a-t-il souligné.

Retrouver l’intégralité de cette allocution ci-dessous :

« Rares sont les occasions ou l’assemblée nationale et les députés se distinguent par un travail qui allie désintéressement, envergure du sujet et importance des auditions. D’évidence, c’est le succès que les auteurs de cette mission d’information ont rencontré à travers leur rapport. Qu’ils en soient chaleureusement et sincèrement remerciés.

L’Etat islamique pose des questions qui dépassent le simple cadre national : l’histoire heurtée du Proche-Orient n’a cessé d’appartenir à notre Histoire comme nous n’avons pas cessé de lui être redevables. Sans l’araméen, que parlait Jésus Christ, pas de chrétienté. Sans les premiers évêques et apôtres, pas de conversion des peuples d’Europe et donc pas de construction de la Nation française à travers le baptême de Clovis.

Nous aurions tort de refuser de prendre en compte le cadre historique qui intervient au sujet de l’Etat islamique. Le Proche-Orient tout entier conserve la mémoire des califats, des dominations et des conquêtes. Les souvenirs glacés de la domination ottomane exaspèrent la vision du monde des chrétiens du Nord de l’Irak, qui portent pour certains encore les patronymes de Diarbakir et Mardin ou leurs ancêtres furent massacrés par les Jeunes Turcs mais aussi celle des Syriens qui se révoltèrent contre les émirs.

Le rêve ottoman du calife Erdogan ne manque pas de soucier, par exemple, le Patriarche melkite Grégoire III Laham qui, dans un récent ouvrage d’entretien, rappelle que l’islamisme détruisit tous les clochers de Syrie dès 1860. Et l’Etat islamique est aussi cela : une réminiscence de temps barbares dont beaucoup de pays d’Orient s’étaient débarrassés.

Le trafic de pétrole face auquel la coalition aurait pu intervenir. La criminalité organisée autour des vestiges antiques en Irak et en Syrie. Les filières d’acheminement du Captagon, notamment dans la Bekaa, où l’ONU mime une intervention factice depuis trop d’années. La présence d’argentiers saoudiens entre la frontière turque et Raqqa ou Alep. L’embargo assassin de la communauté internationale contre la Syrie. Tous ces éléments maculent les bilans de tous les dirigeants internationaux. Certains de mes collègues sont allés sur le terrain, auprès de ces réalités. Ils étaient de droite et de gauche et peuvent témoigner que la politique de François Hollande, celle de l’Union Européenne et celle des Etats-Unis ont souillé l’Occident pour des décennies.

Les chrétiens en sont les victimes. Les chiites en sont les victimes. Les minorités diverses en souffrent horriblement. En Syrie, la majorité des soldats de l’armée régulière sont sunnites. La description faite de leurs sacrifices alors qu’ils participent à la reconquête face à la barbarie islamiste est une insulte à l’honneur de la France. A l’honneur de tous nos soldats qui abandonnèrent des années durant femmes et enfants pour œuvrer au Liban, en Syrie, et même dans une partie de l’Irak actuelle.

Le contentement orné de défense des droits de l’homme avec lequel une partie des politiques français ont traité les questions de la représentation politique en Syrie est une tâche indélébile. Une tâche parfois aux limites de la compromission silencieuse avec des massacres historiquement sanglants.

Je ne peux terminer un mot sans évoquer la politique de la France en Syrie. Entrainement de cadres rebelles en Jordanie, suppression de notre ambassade, soutien appuyé à l’Arabie saoudite, la France n’a pas cessé d’y soutenir la cause de l’islamisme politique. La simple évocation de Laurent Fabius et François Hollande devant les chrétiens syriens déclenche un torrent de colère que nous ne pourrons résorber sans une réorientation totale de notre politique étrangère. Cette colère froide, c’est celle qui serre encore la gorge des Français en se rappelant que notre ministre des affaires étrangères a dit un jour qu’Al-Qaïda en Syrie faisait du bon boulot.

Aux auteurs de ce rapport, je renouvèle mes remerciements. Ils auront mis de l’information et de l’engagement pour la vérité, là où notre politique extérieure n’avait placé que la vente d’armes et la soumission régionale. C’est un pas. Nous devrons en faire bien plus pour retrouver notre place au Proche-Orient. »

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